lundi 26 février 2018

Les verbes défectueux suite

Les innovations développées par les dialectes maghrébins dans la conjugaison des verbes défectueux visent, comme dit précédemment, à faire apparaître le plus possible la semi-consonne finale du verbes. Ces innovations semblent se répartir dans les dialectes sous formes de strates ou niveau: Le premier niveau regroupant des innovations partagées par le plus grand nombre de dialectes, au sein de ces dialectes, un groupe plus restreint connait d'autres innovations, et ainsi de suite. On peut définir ainsi 4 niveaux selon le degré d'innovation du dialecte.

Niveau 1

Ce premier niveau concerne la conjugaison à l'accompli au  singulier féminin et au pluriel de l'ensemble pour l'ensemble des verbes défectueux. En arabe classique,  pour l'accompli, contrairement à la situation uniformisé des dialectes, il y a plusieurs conjugaison possible selon la nature de la semi-consonne du verbe défectueux: ي و أ ؤ ئ.  Les hamza ont globalement disparu des dialectes maghrébins, de même que les verbes se terminant en و, voici les conjugaisons qui nous intéressent:

مَشَت maşat Elle s'en est allé.
مَشَوا maşaw Ils s'en sont allés.

L'innovation en question fait de ces verbes مشات مشاوا mşāt mşāw en faisant apparaître une voyelle longue pour mieux exprimer la semi consonne final. 

*Les dialectes n'ayant pas adoptés cette innovation ont respectivement مشت مشوا mşet mşū. Ce sont:
Tout les parlers libyens, les ruraux tunisiens dans leurs grande majorité, et ceux de l’extrême est Algérien (Tebessa, Touggourt, El Oued).

remarque 1: Notez que les verbes comportant anciennement un hamza (parmi lequel des verbes très basiques comme يقرأ يجئ يخرأ (lire, venir, déféquer) font قرأوا et جأوا avec un long "a", ce qui fait que les parlers innovants sont paradoxalement pour ces verbes précis plus proches de la forme classique.

remarque 2: Le dialecte égyptien du Caire a également développé une innovation pour faire apparaître la semi-consonne finale: مِشْيِت مِشْيِوا mişy et mişyu de même nisyet nisyu, mais étrangement 'rit et 'rū قرووا قرت

Niveau 1 bis

Étrangement pour ce même fait (la conjugaison des verbes défectueux à l'accompli pour les personnes pluriel et féminin), certains dialectes font la distinction entre les verbes de forme I (forme nue comme dans les exemples précédant) et ceux des formes à deuxième radicale redoublée (II et V) ou avec un long (III et VI), pour ces formes, la version conservatrice est possible, et même plus courante: 

arabe classique: 5allat خَلَّت (elle a laissée, forme II); nādaw نادَوا (ils ont appelés, forme III); ta3arrat تَعَرَّت (elle s'est dénudée, forme V); talā9aw تلاقوا (ils se sont rencontrés, forme VI).

L'innovation attendu (du niveau 1) donne خلّات ناداوا تعرّات تلاقاوا.

*Les ruraux algériens, spécialement ceux de l'Oranie et de sud Constantinois (wilaya de Biskra et de Ouargla) connaissent également:
5allat, nādu, t3arret, tlāgu.


Niveau 2

Cette innovation concerne la conjugaison à inaccompli des verbes défectueux de type "A" (voir article précédant) au féminin et aux personnes pluriels, l'arabe classique donne toujours une voyelle courte (sauf lorsqu'il y a anciennement un hamza):

يَنْسَوْنَ yansawna. Ils oublient.
اِنْسَوْا insaw. Oubliez (impératif pluriel).
اِنْسَيْنَ insayna. Oublie (féminin).

Les dialectes innovants ont ينساوا انساو انساي yensāw; ensāw; ensāy. De même nebdaw (nous commençons), telqaw (vous trouverez), tebray (elle guérira), etc...

* Les dialectes qui n'ont pas cette innovation tout en ayant celle du niveau 1 sont les même que ceux qui n'ont pas l'innovation 1 bis à savoir les parlers oranais et ceux du sud constantinois. Ceux ci ont yensu, ensi, telgu, comme en Libyen et les parlers orientaux d'ailleurs ... Dans le centre (parlers saharien algérien, wilaya de Djelfa, Laghouat par exemple) les deux formes coexistent mais les versions innovées sont plus courantes.

remarque 1: La remarque 1 du niveau 1 est valable ici (pour les verbe en أ ). ye9rāw est plus proche de يقرأون que ne l'est ya9rū (ou yagrū).

remarque 2: Les parlers conservateurs orientaux ont toujours la diphtongue courte de l'arabe classique.

Niveau 3

C'est le dernier niveau d'innovation. Elle concerne les mêmes personnes que le niveau 2 mais pour les verbe en "I" cette fois.

يَمْشَوْنَ yamşawna. Ils marchent.
اِمْشُوا imşu. Marchez (impératif)

Les dialectes innovant, de nature pré-hilalien pour la plupart, ont يمشيو امشيو yemşīw emşīw. Pareillement: na7kīw (nous racontons/parlons), t5allīw (vous laissez), etc...

* Cette particularité se retrouve à Alger, dans le nord Constantinois, à Annaba, à Tunis, et dans le Maroc en général.


RECAPITULATIF 

Niveau 0

Algerie: Oued Souf (El Oued), Touggourt (Ouargla), Zeribet El Oued (Biskra), Tebessa, Mechroha (Guelma).

Tunisie: Douz, Tataouine.

Libye: Partout.


Niveau 1

Algérie: Ain Naga (Biskra), Ouargla, Saida, Oran, Sidi Belabbas, Mascara, El Bayadh.

Tunisie: Mateur (?).

Niveau 2

Algerie: Laghouat, Djelfa, Bousaada (Msila), Sour El Ghozlane (Bouira), Ksar El Boukhari (Medea), Sebdou (Tlemcen)

Maroc: Tendrara, Guelmim, Layoune.

Mauritanie: Partout.


Niveau 3

Algerie: Tlemcen, Alger, Msila, Setif, Bordj Bou areridj, Constantine, Annaba.

Maroc: Tanger, Fes, Tetouan.

Tunisie: Tunis, Mahdia.


Conclusion

La conservation sur ce point répond comme on pouvait s'y attendre à deux critères selon le parlers étudié: Son caractère bédouin ou sédentaire, d'une part, et sa position géographique, les parlers de l'Est étant naturellement plus conservateurs.

Une exception se dessine, les parlers sahariens du centre Algérien sont moins conservateurs sur ce point que leurs voisins de l'ouest du tell et du sahara (ancienne province d'Oran).

La situation du Maltais (langue descendant de l'arabe parlée par les immigrants africains en Sicile) a de quoi laisser perplexe puisqu'elle comporte à la fois des archaïsmes (notamment formes pluriel) et des innovations (pour les formes féminine): مشوْ mşew  et ملوْ mlew (soit du niveau 0) et مشات mşēt (au moins du niveau 1) yimşū, et 5allēt خلّات (niveau 2 au moins) et yensew ينسو (niveau 1 maximum). Il est possible que cette petite diphtongue "ew" soit plutot une réduction d'une ancienne ēw qu'un archaïsme issue de la langue ancienne, si tel es le cas ce parler se situerai pile au Niveau 2 de la classification proposée ici.


dimanche 25 février 2018

Les verbes défectueux

On parle de verbe défectueux en arabe lorsque la dernière radicale composant la racine du verbe est une des lettres dites semi-consonne و , ى ou ا. Ces lettres ont en arabe classique un traitement particulier puisqu'elle peuvent s'assimiler ou tout simplement disparaître dans certains cas de conjugaison. Les dialectes (surtout maghrébins) ont du mal avec cet aspect et ont innovés pour "régulariser" la situation de ces lettres.

Pour illustrer ce phénomène:
Arabe classique: يَقِفُ  ya9ifu Il se tient debout. De la racine و.ق.ف. Le و a complètement disparu sous influence du radical ي de la première personne du singulier.
Arabe dialectal: يوقف yūw9af (Alger), yūgef (Laghouat) yiw9af (égyptien). Le و est "rétabli" dans tous les cas.

Arabe classique: قُل Dit (impératif). De la racine ق.و.ل. Le و est court. Remarque valable pour tout les impératif de verbes concaves (qui comporte une semi consonne en son milieu): بِت (passe la nuit du verbe يبات) et سِر (va. du verbe يسير).
Arabe dialectal: قول سير بات. Tout les dialectes modernes partagent ce trait à ma connaissance.


D'autres exemples concernent justement les verbes défectueux. Ceux ci sont de deux types, selon qu'ils finissent en "A" ou en "I" (ceux en "U" ont quasiment disparu j'en donnerai quelques exemples dans un prochain article) à l'inaccompli (à l'accompli, tout les verbes défectueux se conjuguent de la même manière):

En "A": Il s'agit pour la plupart du temps, comme en classique, de verbe dont la dernière radicale est ي:
ينسى (oublier), يطفى (être éteint, comp. يطفي éteindre), يلقى (trouver), يخلى (se vider, comp. يخلي vider), يرعى (paître).

On trouve également des verbes comportant un hamza ou un waw ramenées en dialecte à un simple ا:
يرجا (attendre, class.يرجو).
يملا (se remplir, class. يملأ).
يبطا (tarder, class. يبطؤ)
يلبا (boire le petit lait ou colostrum, class. يلبأ)
يبرا (guérir, class. يبرئ)
يقرا (lire, class. يقرأ)
Appartiennent à cette catégorie tout les verbes défectueux de formes V: يتمشّى (marcher), يتسمّى (se nommer).

En "I": La dernière radicale est comme en classique ي.
يشري (acheter), يدري (connaitre), يرمي (jeter), يمشي (marcher).
Les verbe de forme II appartiennent nécessairement à cette catégorie: يقرّي (enseigner), ينسّي (faire oublier), يعيّي (fatiguer).


Fait intéressant, dans les dialectes algériens, deux verbes du vocabulaire de base sont traités comme des défectueux alors qu'ils n'en sont pas: à savoir les verbes manger et prendre, qui font respectivement كلا et  خذا (dans certains parlers خضا) alors qu'ils conservent leurs formes originels à inaccompli ياكل ياخذ (class. يأكل يأخذ). Cette particularité est propre à la quasi totalité des parlers maghrébins, seul au Maroc dans certains régions on entend des formes concaves كلت  et خذت (rappelons que la forme régulière أكل أخذ est toujours en vigueur en orient).

Nous allons voir maintenant la conjugaison des verbes défectueux dans les dialectes maghrébins et la répartition des différentes innovations.

vendredi 2 février 2018

La division du temps traditionelle

A une époque pas si lointaine (jusqu'au début du XXième siècle) les horloges et les montres étaient inconnus de la plus grande partie de l'Algérie, poser la question "Quelle heure est-il ?" n'avait de sens que dans les villes ou au sein des établissements religieux. A la campagne et dans le désert, la population se servait d'une multitude de mots pour se repérer dans le temps

1- De l'obscurité au lever du jour من الفجر الى الشروق

Avant l'apparition du soleil dans l'horizon, la lumière de cette astre vient éclaircir l'obscurité, cette période dure environs 1h30 on l'appelle en français l'aube ou point du jour, en arabe نجمة الفجر, c'est durant cette intervalle que s'accomplit la prière du jour صلاة الفجر ou صلاة الصُبح.
L'aube se dit également drwīdīş درويديش, c'est le moment où l'on peut commencer à distinguer les objets.

Aurore 
Succédant à l'aube, l'aurore se caractérise par l'apparition des rayons du soleil à l'horizon. Ce court instant qui annonce l'apparition du soleil est appelé الغُبَيْش elġobeyş/loġbeiş ou dardūş دردوش ou tout simplement الفجر (les arabes distinguent encore deux aurores الفجر الكاذب et الفجر الصادق qui se succèdent dans un cours instant, ont entend donc parfois الفجرين).

Puits le soleil se lève. (= الشروق/ طلوع الشمس), on rentre dans la matinée.


2- La matinée الصباح

Le matin de manière général est الصباح, si on veut parler de la matinée, c'est à dire d'une journée en particulier, on dira الصحبة ou الصُحبيّة. La matinée commence par le moment où la clarté est complète dans le ciel, c'est le الضحا.

Deux heure plus tard environs, on rentre dans le الضحا العالي ou الضحوة le soleil commence à être haut.

Puits le soleil atteint son point culminant c'est le midi, en arabe نص النهار ou العلام.

3- L'après midi العشوة او العشيّة et le couché du soleil الغروب

Une heure après le midi, la matinée s’achève, l'après midi (العشوة ou العشيّة) vient de débuté avec le الظهُر, c'est à ce moment qu'on accomplit la prière du même nom. Pile entre le midi et le couché du soleil, c'est العصر et la prière associée. Une heure plus tard on rentre dans le العصر الضيّق.
Quand le soleil commence à se cacher dans l’horizon c'est le الغروب, on dit du soleil تغرب ou تتمسّا. Une fois complètement caché, on voit encore sa lumière dans le ciel, c'est le crépuscule (même phénomène que l'aurore mais inversé) en arabe المغرب. Ce moment détermine l'avant dernière prière de la journée. Après ce moment c'est le مسا le soir.

4- La nuit

Lorsque toute la lueur du soleil a disparut du ciel, environs une heure et demi après le المغرب, on entre dans العشا. Pour désigner ce mot on se sert aussi du mot العتمة. Deux heure plus tard, l'heure où l'on se couche habituellement, on est dans الغطسة Le plongeon (le verbe غطس plonger est employé dans le sens de dormir brusquement sans le faire volontairement)
Une heure plus tard العسة الأولى, le coq fait entendre son premier chant.
العسة الثانية correspond avec نص الليل la moitié de la nuit, il est minuit.
A deux heure du matin on place العسة الثالثة et correspond au troisième chant du coq.
A quatre du matin c'est العسة الرابعة.

Puits c'est l'aube et une nouvelle journée commence.


Complément

بُكرة: Début de journée. Juste après le lever de soleil. En orient ce mot à pris le sens de "demain".
البارح: Ce mot désigne à l'origine la soirée de la veille (et امس يامس hier), aujourd'hui c'est le mot le plus communément employé pour "hier" (en Egypte امبارح).

jeudi 1 février 2018

Les mots féminins sans ة Suite



A part les cinq premiers mots qui sont des plus communs, la majorité du vocabulaire ici appartient à des domaines particuliers comme la poésie ou le langage des éleveurs, ils sont par conséquent d'un emploi très rare, surtout dans leurs forme sans ة lorsque celle ci coexiste avec une forme marquée de cette lettre.

Les mots et qualificatifs qui s'appliquent aux femmes:

اُم :  mère. Il est prononcé tel quel dans les dialecte ruraux (avec les affixes ont dit ommuk, ommu, ommhā, ommnā, ...) où ils coexiste avec une seconde forme مّا (mmāh, mmāhā, ...). Les dialectes qui connaissent une influence citadine ont aussi يمّا yemmā ou yummā (Est). Celui ci peut comporter un ة à Alger avec les affixes où yemmāto يمّاتو (sa mère) est possible mais moins courant que yemmāh. En revanche à l'état construit ce ة se montre toujours pour ce mot: yemmāt lūlīd يماة الوليد  (la mère du petit enfant) et aussi la fameuse et curieuse expression يماة يماه. Le diminutif mwīma (plus souvent mmwīma)  مويمة ou īmīma اميمة (Est) comporte toujours le ة.

اُخت: Sœur.

بنت: Fille.

عجوز:  vielle femme. Dans les parlers citadins (Tlemcen, Cherchell, Alger, Constantine, ...) on dit عجوزة et عجوز signifie vieil homme.

عروس: épouse. Comme pour عجوز, les parlers de sédentaires emploient la paire عروس/عروسة pour le fiancé et la fiancée. Les ruraux ont en principe عريس/عروس mais le mot  عروسة s'entend parfois (rarement) aussi pour fiancée, par contre le fiancé est toujours عريس. En Libye, عروسة est attesté.

عيال: Femme. Ce mot signifie plus proprement "le ménage, le foyer, la famille" mais sert surtout à designer la femme dans certains parlers.

ستّوت :  Vieille mégère, sorcière. Ce mot tire son origine dans l'idée de 60 ans ستّين سنة. A Alger c'est ستّوتة et s'applique à toute femme vicieuse et haineuse.

خادم : servante (négresse). Ce mot est pan-maghreb. On le retrouve dans le nom du village de بئر خادم dans la banlieue d'Alger. Il est aujourd’hui peu employé car très chargé négativement.

عاقر (tr. 3āger): stérile (s'applique aux femmes ou aux animaux femelles). On entend aujourd’hui plus couramment عاقرة.

حامل : enceinte. Contrairement aux dialectes orientaux, le mot حاملة existe et s'emploi même plus couramment en Algérie.

عانس: vielle fille.

طالق: Divorcée. Non utilisé à ma connaissance en dialecte algérien.

باير : vielle fille également. Aujourd'hui le mot بايرة l'a totalement supplanté, et on dit même باير pour vieux garçon ce qui est une aberration vis à vis de l'étymologie de ce mot: terrain inculte, non cultivé.

عاتق (tr.3āteg, pl. عواتق) : fille vierge.
بتول: Meme Sens.
بكر :  Meme Sens. Chamelle ou jument apte à procréer qui n'a pas encore été montée. Voir l'article sur les chameau. On dit plus souvent بكرة.
ضامر : Femme svelte. 
ستّ: Reine.
رداح : Femme d'une grande beauté. Du nom d'un personnage de la geste hilalienne.
بالغ:  pubère. S'emploi pour les hommes aussi.

Des mots qui définisse un animal femelle ou perçu comme tel:

فرس (prononcé fraṣ): Jument. Mot qui malheureusement tend à s'effacer devant عودة.
عارم :  Faucon femelle.
عقرب: Scorpion.
ثعبان: Serpent.

Des mots relevant de  la gestation des animaux: 

طارد (pl.طُرُّد) : en chaleur (chienne, brebis, chèvre)
قايم gāyem (pl.قيّم) : en chaleur (vache).

ميسّر : en chaleur (chamelle)

اُمّ حضان: pleine (chienne, chatte).
شايل (pl.شيّل): pleine (chamelle). شايلة est plus usité.
رادف : pleine (jument et ânesse). رادفة est possible.
دافع (pl.دُفُّع): pleine (brebis). Un éleveur de la région de Ouled Djellal (Biskra) l'a employé pour une chamelle mais je pense que c'est un abus de langage et qu'il ne s'applique en principe que pour les brebis.
مرقّد mregged (pl.مراقيد): pleine (vache).

رازم (pl.رزّم): sur le point de mettre bas (jument)
والد (pl.وُلّد):  mettant bas.
كسّاب: très fertile (chamelle).
ولّاد : même sens.
محلاب ou محلب : Qui produit beaucoup de lait (chamelle).
كتول قتول : Qui fait une fausse couche (chamelle)
حايل (pl.حيّل): qui n'a pas conçu pendant un an.

تابع  (pl.تبّع): suivie par son petit (jument, ânesse).
خلفا (pl.خُلّف ou خلفات): suivie par son petit (chamelle).
فروق furūg (pl.فُرُّق): séparée de son petit (jument, ânesse).


mercredi 31 janvier 2018

Les mots féminin sans ة



Selon les linguistes spécialistes des langues sémitiques le genre n'était pas marqué dans les noms et il ne se manifestait que dans les phénomènes d'accord, en particulier avec les pronoms. C'est cette situation qui prévalait dans l'arabe ancien. Preuve en est le nombre conséquent de mots féminins qui  dépourvu du suffixe indiquant le genre féminin, à savoir le ة (ta marbuta تاء مربوطة). Pour commencer signalons que les pluriels et les collectifs sont potentiellement tous féminin et sont loin de tous se terminer par un ta marbuta:
7asdetni l3arab (pluriel) حسدتني العرب Les arabes m'ont jalousé.
ennās (collectif) rāhā tgūl الناس راها تقول Les gens disent.
drāhemna (pluriel) rā7et دراهمنا راحت Notre argent est parti.
tūred ezzewāyel (pluriel) تورد الزوايل Les bêtes boivent.


A noter que la tendance (surtout dans les villes) qui prévaut aujourd'hui est d'accorder ce type de nom au pluriel plutôt qu'au féminin.

En dehors de ces noms qui portent en eux la notion de pluralité il existe des noms purement singuliers qui s'accordent au féminin et qui n'ont pas de ة. Ils en existe deux types en fonction leurs signification: les uns sont intrinsèquement féminin par leur sens même et d'autre n'ont rien qui laisserai déduire de leurs genre féminin, il faut les apprendre par cœur comme une liste d'exceptions. Le coran nous fournit une multitude de mots appartenant à cette catégorie. La tendance générale qu'accuse les dialectes modernes est de réduire leur ambiguïté en leur attribuant un ة ou (plus souvent) en les traitant comme des noms masculin.
Ces mots relèvent pour beaucoup des éléments du monde naturel ou des parties du corps humain:

شمس (soleil)
قمر  (lune)Masculin en Algérie. La variante قمرة est assez répandu.
سماء (ciel) Masculin en Algérie.
ارض (terre)
نهار (jour): Peut être masculin et féminin en arabe classique. En Algérie il est masculin mais on entend aussi dīk ennhār.
نار (feu)
ريح (vent): Masculin en Algérie.
بئر (puit): Masculin en Algérie.
عين (œil ou source)
يد (main)
ذراع (bras)
كبد (foie): Devenu كبدة au Maghreb.
رجل (pied)
إذن (oreille, prononcé en Algérie وذن)
بطن (ventre): Ce mot, qui veut plutôt dire portée en dialecte algérien est relativement peu employé. C'est le mot كرش qui l'a remplacé qui comme lui est féminin et sans ة. Par ailleurs le mot كرشة existe et a une autre signification c'est la panse d'un animal à proprement dite, la poche que l'on retire lors du dépeçage.
دار (foyer)
نفس (âme, être): Sous l'influence de ce terme, ses synonymes روح et خاطر sont féminins (systématiquement pour روح, quant à خاطر  il est surtout masculin)
طريق (chemin)
سكين (couteau) : Masculin en Algérie, tout comme موس plus employé en ce sens. En Tunisie on dit aussi سكّينة.
حرب (guerre)

Il doit nécessairement y en avoir d'autres mais c'est tout ce que j'ai put réunir.

Il y a quelques termes qui rentrent dans cette catégorie en arabe dialectal tandis qu'ils étaient masculin en arabe classique:

موت (mort): influence du ت final ?
بيت (maison, chambre): Influence du mot دار ou du ت final ?
بلاد (pays, ville): Difficile de dire si s'agit de بلد où la deuxième syllabe a été allongée, les dialectes maghrébins en donnent de fréquent exemples (علام drapeau pour عَلَم; Aussi  سباب cause pour سَبَب; Encore راجل pour رَجُل) ou si c'est un pluriel réinterprété comme singulier (جنان jardin, pluriel de جنة), ce qui expliquerai mieux son genre.
كرش
روح
خاطر
شتا مطر نو  (pluie, voir article sur ce thème)

Mais plus intéressant à mon avis sont les mots dont le sens implique un genre féminin. Plus encore que ceux qui viennent d’être listés, ils sont en voie de disparition dans les dialectes, particulièrement ceux du Maghreb. Je donnerai une liste de ces mots (puisée dans le dialecte algérien) dans la suite de cette article.

(à suivre) 

mardi 30 janvier 2018

Les Chameaux partie 4 (fin)


Stations et comportement

نزاف :Chameau qui supporte mal la faim, qui sut en route et doit se fair pousser.
شرّاد: peureux, qui fuit quand on veut le charger ou qu'il entend du bruit.
زعزاع: Qui crie quand on veut le charger.
مجناف: Qui a tendance à s'éloigner du troupeau.
ميّح: Pencher d'un coté, incommodant pour celui qui le monte.

Les mugissement sont الرغا, on dit que le chameau يرغي ou يهدر (aussi يهدّر). Le grondement est appelé زيْمة (on dit qu'il يزيم).

Lorsque le chameau s'agenouille on dit qu'il برك, celui qui le fait agenouiller برّك (nom d'action تبراك).
Pour le galop les verbes employés sont رقص et طرمز. Pour la vive allure qui n'est pas le galop on dit du chameau yejjaba تجابى ou ytawwa7  توّح.

Une fois conduit (مخّرف) vers le lieu où il  va passer la nuit (معطن)où il ne devra plus bougé, le chameau a les coudes noués (ربط) entre eux par une cordelette 3gal (عقال) il est dit ma3gul (pl. m3aggla) معقول ج معقّلة. Par le même procédé on peut en également entravé le chameau, celui ci alors pourra se déplacer sur des courtes distances, il est ainsi mgayyed مقيّد.

همز: Lever un chameau.
بطّ: Frapper le chameau.
صرّف: Réunir le troupeau.
نشّت: Pousser au devant.
نخس: Opérer un mouvement brusque (?).
صاق: Conduire le chameau. (syn خرّف)
عبّر: Charger.

Aspect et races

مدحدح: Trapu.
مكرتف: Au muscles saillants.
بو لبّة: Au poitrail velu.
مفكّك: A la tete imposante.
عابر: Fort.

اخضر: Noir.
ابيض: Blanc.
احمر: Sombre, marron.
اصفر: Fauve.
ازغم: Fauve doré.
مرسّغ: Gris.
ازرق: Gris noir.
احجل: Qui a les membre inférieurs clairs.
حوّ: Qui a la tete rayée.
Des mehara à Biskra

عشاري: Chameau qui a été dressé pour être capable de marcher 10 journées consécutives sans s'abreuver.
مهري (pl. مهارى): Chameau de race, employé uniquement pour être monté. Du nom d'une tribu et région yéménite المهرة.
مهين (pl.مهان): Chameau commun par opposition au مهري.
نعوري: Chameau qui tire l'eau du puit et transporte les outres.

Les Chameaux partie 3



Le troupeau

وسيقة usiga (pl.وسايق ): troupeau en marche par opposition a ابل (en pâturage).
رحيل : chameaux portant les bagages de la tribu en migration.
زمّالة:  chameaux  de charges dans une caravane ou une expédition militaire.
بعيرات: Troupeau de 20  tetes (ragba رقبة cou).
ذوْد: Troupeau de 20 à 50 tetes.
مخلل: Troupeau de 50 tetes.
ابل (pl.ابال): Troupeau de 100 tetes. يابيل Des quantités de chameaux.
محوّش: Troupeau de 200 tetes.
مجرودة (pl.مجاريد): Troupeau de chamelles déchargées de tout travail.
كُحيْلة: Les chameaux. Peut-être dut à la couleur que prennent un fois par an les chameaux après la tonte (تزاز), lorsqu'on les recouvre de goudron (قطران) pour les protéger de la gale (الجرب).
باعير: Tout ce que l'on possède en chameaux.

L'anatomie 

خنشوشة: Devant de la tete.
ذروة (pl.ذرو) : La bosse du chameau, on dit également (plus rarement) شطّة. Celui qui a une très belle bosse est dit mhayyeg مهيّق. Celui qui est blessé à cette endroit est dit mga7ga7 مقحقح.
اثار : Couche de graisse de la bosse qui s'est conservée d'une année à une autre. Signe d'opulence.
سنّ: Colonne vertébrale.
كركرة ou ثفنة: Sternum (cage thoracique). Partie sur laquelle se pose le chameau quand il s'assoie. Très important pour choisir l'étalon. On le recherche saillant.
بادرة: Poitrail.
لوح (pl.الواح): Omoplate.
حاز:  Jambe. الاوّل antérieur. التالي Postérieur.
مضارع: Les membres.
عضالي: Muscles.
جنب (pl.جنبة): Flancs.
تابع: Queue. On dit également عُكاف. Remuer la queue se dit شحّط.
وبر: Les poils. Très employés par les nomades pour confectionner leurs habitations et leurs vêtements. Les arabes nomades sont surnommés à ce propos اهل الوبر.
غبغوب: Poils longs et durs qui poussent à proximité du cou.
عرّوز: Touffe de poils que l'on laisse au sommet de la bosse lors de la tonte.

زبود: Écume.
عطن: L'urine. عطّن Uriner. Est traditionnellement employée comme remède contre la tension et le diabète.

Pour égorger le chameau on emploi un verbe spécifique نحر.

Les crottes sont nommées selon qu'elle sont fraîches (بعر)  ou sèches (وقيد) pouvant servir de combustible. Ces deux mots sont communs à tout les ruminants (bovins, ovins, caprins,...).

(à suivre)

lundi 29 janvier 2018

Les Chameaux partie 2


Le chameau de sa naissance à l'age adulte:

A chaque fois qu'un  journaliste arabe rencontre un chamelier il ne peut s’empêcher de l'interroger sur les différents termes qu'endosse le chameau selon son age, ce genre de précision est une vrai curiosité pour le non initié. Ce genre de distinction n'est pas propre chameau, on trouve des expressions similaires pour le mouton, le cheval, et même l'autruche (!). Il va sans dire que ces termes varient  d'une région à une autre, la liste que je donne ici est basée sur des éleveurs originaires de: El Oued (Taleb El Arbi), Ghardaia (Zelfana), Sud oranais (ouvrage du général Daumas):

حوار (pl.حيران c'est ce mot que l'on retrouve à ksar el Hirane dans la wilaya de Laghouat): Chamelon qui vient de naître.
لبون libūn ou مخلول (pl.مخاليل) ou encore (dans l'ouest) a7wali احوَلي (pl.7uliya حليا): Chamelon sevré (1 ans environ). On ne le tond pas.
بن لبون bellibūn ou ولد لبون weld elbūn ou encore مخلول : Chamelon de deux ans. On commence à le tondre mais il n'est pas encore apte à supporter des charges.
حِق tr.7igg ou حشي (tr. 7ashi pl.حشيان) : Chamelon de trois ans. On le charge mais pas trop.
جدع (arabe littéraire جذع): Chamelon de quatre ans. Peut supporter des vrais charges.
ثني: Cinq ans.
رباع (pl.ربعان) ou قعود (pl.قُعدان): Six ans.
سداس ou قعود: Sept ans.
قارح gāra7 (pl.قُرُّح) : Huit ans. Le chameau a complété sa dentition il est adulte.

ولد عشار ou بن عشار: Chamelon d'un à deux ans qui a été retenu par sa mère après l'accouchement.
بكر: sens 1. Chamelle propre à la reproduction (cinq ans). On dit aussi (plus souvent) بكرة. Sens 2. Chameau de trois à six ans.

Puis on se sert des termes ناقة , بعير et جمل. Quand le chameau est en fin de vie on se sert des mots:
شارف  (pl.شُرُّف) et ثلاب (pl.ثلوبة)

La reproduction

فحل (pl.فحول): Chameau reproducteur. Il y en un pour une quinzaine de chamelles.
عزري (pl. عزارى): Chameau mâle non-reproducteur, castré. Le mot signifie également domestique blanc, tandis que domestique noir se dit عبد (pl.عبيد) ou وصيف (pl. وصفان). *
زوزال zawzāl (pl. زوازل) : Chameau qui vient d’être castré. A peu près synonyme du terme précédent. Ce mot devait peut être s'écrire  جوزال puisque c'est bien à la racine جزل ("couper, séparer du reste en coupant") qu'il doit être rattaché. Le traitement des consonnes sifflantes (j, s, sh) dans les parlers maghrébins mériterait un article.

L'étalon en rut est dit هايج (le verbe يهيج). Cela à lieu a du début de l'hiver à la fin du printemps. Durant cette période l'étalon à son palais qui gonfle, ce gonflement est appelé كشكوشة. Le verbe جفر signifie que le chameau sort de sa période de rut. L'accouplement est rendu par le verbe خبط.

ميسّر myassar : Chamelle en chaleur.
شايل (aussi شايلة, pl.شيّل): Chamelle pleine.
عُشرة (pl. عُشُّر ou عشاير ou عشرات): Meme sens.
لاقحة : Chamelle qui vient d'accoucher et qui a son lait (pl.لقاح). Chamelle sur le point d'accoucher (pl.لُقّح).
كسّاب: Chamelle très fertile.
ولّاد: Meme Sens.
محلب ou محلاب: Chamelle qui produit du lait longtemps après son accouchement.
خوّارة (pl. خواوير): Meme sens.
خلفا (pl.خلفات ou خُلّف ): Chamelle suivi par son petit.
كتول ou  قتول : Chamelle qui a avorté, mit bas prématurément.
حايل (pl.حُيّل ou حُيّال ): Chamelle qui après avoir accouché ne peut plus concevoir pour une durée d'un an.
عاقر: Chamelle stérile.
فروقة: Meme sens.

(à suivre)

* Je pense que c'est ce terme qui est à l'origine du mot عزّي que les marocains emploient pour désigner un noir.

dimanche 28 janvier 2018

Les Chameaux البل partie 1



CHAMEAU OU DROMADAIRE ?

Pour commencer c'est à dessein que nous employons le mot "chameau" et non pas "dromadaire" comme le voudrait cette absurde idée reçue qu'on nous a tous inculqué dès le plus jeune age (et malheureusement encore propagée) qui dit que "chameau = deux bosses, dromadaire = une bosse". Il n'y a rien de plus illogique que cette distinction inventé par je ne sais qui et qu'on ne retrouve qu'en français. Ces deux mots désignent en réalité le même animal, à savoir celui qui possède une bosse et qui est originaire d'Arabie.
Le mot dromadaire est proprement grec tandis que le mot chameau (féminin: chamelle, jeune: chamelon)  du latin camelus est un emprunt à une langue sémitique qui ne devait pas être très éloigné de l'arabe sur ce mot, puisque l'on a jamal جمل.
Le mot chameau est donc on ne peut plus approprié dans notre contexte.


LE CHAMEAU CHEZ LE NOMADE

Au même titre que la tente et les moutons, le chameau est indispensable à la vie du nomade. Sans cet animal impossible de déplacer la tribu et tous son mobilier vers les zones de pâturages propres à nourrir le bétail. C'est exactement grâce à cette animal que le bédouin peut commercer, c'est d'ailleurs le rôle qui lui était assigné traditionnellement en Afrique du Nord et en Algérie particulièrement: Les ksours du Sud (قصور, sing. قصر qar ou gar) devaient leurs viabilités aux aller retours continuels des nomades qui apportaient à ces localités pauvres en ressources et impropres aux cultures pour la plupart (exceptés celle du dattier) du blé, de l'orge, de la laine et des moutons.

Cette proximité millénaire entre le bédouin et le chameau a produit une richesse lexicale phénoménale dans ce domaine, celle-ci a été enregistré dans les premiers dictionnaires arabes (pour avoir un aperçu de cette richesse, article qui est loin d'avoir fait le tour de la question). Tout ce vocabulaire ultra-spécialisé est en réalité totalement ignoré par la plupart des arabophones même les plus instruit, celui ci ne peut avoir de sens que chez les petits groupes encore familiarisés avec cet animal. C'est effectivement dans ces groupes de nomades que cette richesse s'est conservé, bien que moindre et en déclin, car l'importance du chameau ne cesse de se réduire depuis l'apparition des moyens de locomotions modernes.

Je donnerai ici l'ensemble du vocabulaire que j'ai pu compilé qui concernant le chameau dans le contexte de l'arabe algérien. Beaucoup de ces mots sont très anciens et toujours attestés chez les bédouins orientaux, d'autres en revanches ont sans doute une origine plus réçente.

Termes généraux:

بلّ ou ابل et plus rarement  بيل: (Collectif) Les chameaux. Le mot ابل (pl. ابال ībāl) peut designer un troupeau de 100 bêtes et même un seul chameau.
جمل (pl.جمال): Un chameau sans plus de précision ou spécialement mâle et adulte.
ناقة naga (pl. toujours نياق nyāet non pas nūcomme en orient et en arabe littéraire): Chamelle.
بعير (pl.باعير): Chameau mâle adulte. Le pluriel signifie aussi troupeau de chameaux.

Le surnom que l'on donne aux chameaux est guwāreb elberr قوارب البرّ "Les vaisseaux (navires sing.قارب) de la terre".

(a suivre)

vendredi 26 janvier 2018

La pluie, les nuages et les grelons

Un des mots assez utile comme déterminant dans les dialecte arabe d’Algérie est le mot pluie:
Dans les parlers sédentaires issus de la première vague d'arabisation (Tlemcen, Alger, Constantine, etc...) le mot employé est ştā شتا  (invariable, féminin), mot qui à l'origine signifie hiver, froid  شتاء , cette extension tout à fait compréhensible de l'aire sémantique de ce mot, existe également dans les dialectes orientaux comme en Palestine et en Egypte.

Pour les dialectes plus influencés par la seconde vague d'arabisation (celle dite hilalienne, de la tribu des bani hilal) on trouve deux mots:

L'un est le classique mear (pl. mūr, amār) مطر ج مطور او امطار. Pas grand chose à dire sur ce mot, si ce n'est qu'il se montre plutôt chez les parlers les plus conservateurs des hauts plateaux et du sahara. Le mot est habituellement masculin.

Le second est le mot naw ou naww (féminin, pl. nwāw) نو, très employé dans les dialectes de l'ouest, c'est la variante qu'on entend le plus dans les dialecte telliens (Tiaret, Mostaghanem, Saida, ...), on le trouve également dans l'est marocain et en Tunisie rurale. Je n'ai pas trouvé de trace de ce mot dans les dialectes orientaux pourtant il a une origine très intéressante et est d'une antiquité remarquable:
Les arabes d'avant l'islam attribuaient à certaines étoiles le pouvoir d'apporter la pluie, l'étoile qui se couchait vers l'occident était nommée النوء (du verbe ناء se lever, sous entendu de l'étoile qui apparaissait au même moment en orient) si la pluie succédait cet événement on disait: صدقت النوء L'étoile (couchante) a été véridique. De là le mot à pris la signification de pluie, également de tempête, ouragan.

Pour souligner l'aspect bienfaiteur et regénérateur, la pluie peut être nommée elġayθ الغيث.

La brouillard peut se dire de plusieurs façons:
ġaym غيم lorsque il est léger (on parle de brume en français). L'expression consacrée pour décrire ce type de temps est الحال مغيّم.
On parlera de Ḓobāضباب pour le vrai brouillard, pareillement on dira الحال مضبّب.

Rosée

Pour l'humidité nous relevons les mots nda ندى  (également rosée) et deθθ دثّ (également pluie fine). Nous constatons avec dépit que le mot français miditi ميديتي semble être privilégié aujourd'hui pour décrire ce phénomène.
Un troisième mot plus technique désigne plus particulièrement la bruine (= ou crachin, est un type de précipitations dont les gouttes d'eau paraissent presque flotter dans l'air grâce à leur petite taille définie comme une petite pluie fine, ces fines gouttelettes tombent très lentement) il s'agit de b5ā5 بخاخ.
La pluie fine est le neşş النشّ, quant à celle qui survient de manière soudaine et qui est très intense (averse en français), on la nomme heṭal هطل.
Le gros nuage porteur de pluie (nimbus) est appelé غمام.
Le mot général pour nuage est s7āb (nom collectif, unité: s7āba) سحابة سحاب. Le temps nuageux: الدنية مسحّبة. Les nuages tombent يطيحو السحاب peut être utilisée pour rendre le fait qu'il tombe des grêlons. Les grêlons peuvent être également désigné par le mot pierre on dira dans ce cas: راه يصبّ الحجر. Le mot berbère tabruri تبروري désigne également ce phénomène. Ce dernier mot est pan-Maghreb.

Quand il fait beau et qu'il se met à pleuvoir de manière brève et violente des grêlons, de la neige et de la pluie on parle de 3ers eδδīb عرس الذيب. Ce phénomène qui à lieu lors du passage de l'hiver au printemps est appelé en français giboulée.

jeudi 25 janvier 2018

La tente partie 3


INTERIEUR 

L'intérieur de la tente arabe se présente en différents espaces distincts:
En son milieu (le long de la ṭrēga) une délimitation, qui peut être un rideau ou un tapis (āg, plṭēgān) طاق ج طيقان, sépare la tente en deux espaces dits 5ālfa (pl. 5iwālef) خالفة ج خوالف. Cette délimitation est généralement nommée 7yāl (pl. at) حيال ج ات et dans certaines régions 7āyel (pl. 7uyyal) حايل ج حيّال. La partie des femmes est la malakma ملكمة ou malaṭma ملطمة.

Le segef  (pl. sgūfa) سقف ج سقوفة est la partie de la toile se trouvant au milieu de la tente et qui toujours élevée,  par opposition aux stārāt (sing. stār) ستار ج ات qu'on peut abaisser ou dresser (yarfa3 ou yasmek سمك) avec des piquets. Le stār où se trouve le four traditionnel (كانون) et contigu au malakma s'appelle le rwāg رواق. La fumé du four s’échappe par un orifice appelé fhag (pl. fwāhag) فهق ج فواهق. A l’opposé du rwāg se trouve un autre stār qui peut être ouvert ou fermé en fonction des conditions climatiques la rfāfa رفافة.

Une petite tente est désignée par le mot 3osheysha (pl. 3oshāysh) عشيشة ج عشايش.

Des filets tressés en alfa (حلفة) appelé Ḓfīra (pl. Ḓefāyer) ضفيرة ج ضفاير sont disposées autour de la tente pour la rendre hermétique au vent extérieur (en cas de grand froid).
Pour les puits de longues durées, on creuse des petits tunnels (en français rigoles) appelées ūni/weni وني pour empêcher l'eau de pénétrer dans la tente.

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Mots incertains:
7wāحواق et settūra ستّورة. Deux mots synonymes qui désignent un espace particulier de la tente.
sfāl سفال
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LE CAMPEMENT

Le fait d'habiter un lieu est rendu par y7oṭṭ/7aṭṭ (aussi gayan قيطن) et non pas par سكن, le verbe employé pour dresser la tente est بنى/يبني et pour démonter la tente : طوى/يطوي.
L'endroit où la tente peut se fixer est appelé dār (pl. dyār) دار ج ديار, on dit d'un lieu propice  à l'établissement (avec de bonne ressource en plantes عشب et en eau): دار مليحة. Une fois que la tente est dressée, le dār devient manzel منزل.
Le marṣam مرسم a plusieurs signification: C'est un lieu habituellement connu pour ses bonnes ressources, ou là où les animaux passent la nuit et encore l'endroit où les amants se donnent rendez vous à l'abri des regards.
Le mowkar موكر désigne l'endroit où la tribu a campée pendant une longue durée.
Le 3ozīb (pl.3ozbāwāt) عزيب ج عزباوات est le pâturage situé à une grande distance.
La maştā مشتاة est l'endroit où la tribu passe l'hiver (الشتا).

Les nomades d'une même origine tribale dressent leurs tentes cercle, c'est le duwwār (pl. dwāwīr)دوّار ج دواوير, mot qui a finit par prendre le sens de village (habitation en durs) au Maghreb.

L’extérieur de ce cercle de tentes prend le nom de sā7a ساحة et l’intérieur celui de merā7 مراح ou ra7ba رحبة.
Le smāT  سماط est la moitié du duwwār , on dit par exemple سماط الغربي.
La tur3a تُرعة est l'entrée du duwwār.
Des touffes d’alfa sont employées pour les enclos à bestiaux zrība (pl. zerāyeb) زريبة ج زرايب.

mardi 23 janvier 2018

La tente partie 2

Le but de cet article est de recenser le maximum de termes différents relevant de la tente et employés chez les bédouins algériens. Ceux ci couvrant un très large espace et des dialectes très différents, le vocabulaire donnée ici ne décrit donc pas celui d'un parler en particulier, d'autant que ces termes techniques peuvent varier d'une tribus à une autre.
Je mettrai, en outre, les termes dont je n'ai pas réussi à déterminer le sens avec certitude.

LA TOILE 

البيت الحمرا النايلية
La toile est assemblée par juxtaposition de bandes d'étoffes appelées فليج (pl. فلجة et plus rarement فلجاوات). Ces bandes sont tissées avec la laine de mouton (صوف) puis renforcées avec des poils de chameaux (وبر) et/ou de chèvres (شعر الماعز). La pièces étoffes dont on tire les feldja est appelé hadem هدم. Je tacherai d'écrire un article sur le tissage traditionnel, univers qui a un vocabulaire technique également très riche.
La toile est composée en général d'une dizaine de flīj (une vingtaine pour les plus grandes tentes). La longueur du flīj est défini par le ذراع (environs 50cm), un grand flīj peut compter plus de 20 ذراع, et exceptionnellement 50 ذراع.
Le colorant employé (صبغة) est obtenu en bouillant de l’écorce de grenades (rummāرمّان) séchées qu'on appelle غطسة (prononcé ġaṣa). Différentes raies de tissus formant des motifs peuvent également décoré le flīj, ces raies sont appelé zīg (pl.zīga) زيقة. Une fois décoré, le flīj est dit malgūملقوط.
Les felja sont cousus (مخيّطين مع بعض) entre eux de sorte à être complètement imperméables. L'agencement et la teinte des felja composant la toile varient d'une tribu à une autre, et constituent en quelque sorte leurs signature. Les Awlad Nayl sont connus pour leur tentes très caractéristiques rayés de rouges orangé, tandis que la plupart des 3rūş (tribus, singulier عرش) ont des tentes globalement noirs, couleur de la tente arabe depuis l'antiquité.


TENDEURS ET ARMATURE

Hormis la toile, la tentes n'est composée de deux types d’éléments: les piquets/poteaux (l'armature) et les bandes de tissage (tendeurs) qui renforcent la toile à proximités de cette armature.

En ce qui concerne les tendeurs, le principal est celui nommé ṭrēga (pl. ṭerāyg) طريقة ج طرايق, cette bande traverse la tente en son milieu. Celle-ci est également appelé şābha (pl. şwābah) شابهة ج شوابه dans le Sud-Ouest. Les tendeurs latéraux, plus étroits, sont quand à eux nommés kāser ou kessārīya selon les régions كاسر كسّارية. Chaque tendeur est composé d'une partie qui est cousue sur le flīj qui est nommée ārfa (pl. ṭwāref) طارفة ج طوارف et d'une corde de crin (سبيب) nommée onb طنب qui s'attache aux piquets. La ārfa peut-être nouer sur un arc de bois appelé 5urb خُرب.
Pour gagner en volume, des cordes peuvent être cousus directement sur des felja ceux ci sont appelé les mejābed مجابد.


En ce qui concerne l'armature il y a les mats centraux qui longent la ṭrēga, à savoir les rikāyz (sing. rkīza) ركيزة ج ركاير. Les mats latéraux, plus petit (1m50 environs), sont appelés عماد ج عمود ou عمود

(ce mot connait trois pluriels l'un faisant 3omedda عُمدّة et caractérisent les nomades du tell, le second 3omda عُمْدة dans les hauts plateaux et le désert, ces deux sont issue du classique أعْمِدة , la troisième variante 3med provient du classique عُمُد).
Les mats peuvent être appelé indiferamment wa99āf وقّاف.

Les piquets awtād (sing. uted), qui sont plantés dans le sol (madgūgīn مدقوقين) sont placés aux extrémités de la toile.


Relevant également de l'armature, le guntā قنطاس (ou قنطاص) est une planche de bois horizontale (خشبة ou لوحة) qui maintient ensemble les deux rikāyz centraux de la tente. L'expression 3alla guntāṣ veut dire élever sa tente ou avoir une grande tente. 
Ces deux rikāyz qui se croisent sont attachées entre eux avec une corde qui vient se posée sur des petites ramifications des poteaux confectionnées à cette effet et qui sont appelées 9aş9āş قشقاش.

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Mots incertains:

ṭarfāni طرفاني : Le flīsur lequel est cousu la ārfa  (?)
şaggāgīya  شقّاقية : kāser qui vient définir la zone aş-şigg الشقّ, peut être précisé avec le mot  lwasta الواسطة (?).
θowmīna ثومينة: Nom d'un des 3omūd (?).
ṭrēga tterbā3a الترباعة: Nom de l'espace compris la ṭrēga et la rkīza (?).
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(à suivre)

jeudi 18 janvier 2018

La tente (بيت الشعر) Partie 1



La tente, appelée beyt eş-şa3ar ou simplement el-beyt, a constituée pendant des siècles l'habitat principal des arabophones algériens: au 19ième siècle on estime qu'un tiers des habitants de la régence d'Alger était formé par la population nomade proprement dite (tribus effectuant la transhumance estivale 3aşşāba العشّابة vers les  régions tellienne التلّ du nord).
En dehors des citadins, très minoritaires, et des montagnards (berbérophones pour la plupart), l'essentiel des algériens arabophones vivait sous la tente, et ce, même une fois sédentarisés.

Cette article tentera  de donner un aperçu de la richesse du lexique liés à la tente au sens large (ses composants, ces délimitations, ses réunions, ...) devant l'ampleur de ce thème toutes les contributions sont bien entendus les bienvenues dans les commentaires.

LA TENTE, LA MAISON ET LA CHAMBRE

J'ai dit précédemment que la tente était désignée par l'expression بيت الشعر, littéralement "la maison de poils", ceci est surtout valable pour les populations nomades du centre et de l'Est, dans l'Ouest de manière générale et chez les arabophones sédentaires on lui préfèrent le vocable 5ayma pl. 5yem ou 5yām خيمة ج خيم خيام.  Ce dernier mot a pris également les sens de "maison, famille" dans tout le Maghreb.

Le mot بيت (pl.بيوت) est employé dans les dialectes citadins algérien (Alger par exemple) pour designer la chambre, chez les ruraux ce mot est rendu surtout par şambra شمبرة (pl. ات), par غرفة (pl. غرف), et plus rarement دار. Le mot بيت est toujours réservé à la tente de poil dans les régions où le souvenir du nomadisme est encore vivace.

(A noter que le mot بيت, contrairement à l'arabe classique, est féminin en Algérie: on dit البيت الحمرا et non البيت الاحمر. De même que le mot موت, ex: الموت كاينة. Cela doit sans doute être attribué au ت final de ces mots assimilé à un ة (voir article sur les mots féminin pièges). Rien de similaire n'existe dans les dialectes orientaux à ma connaissance)

دار (pl. ديار mot féminin) employé quasi-exclusivement pour désigner la maison, a traditionnellement chez le nomades arabophone le sens de demeure, lieu ou l'on campe pour une durée plus ou moins longue, ainsi que les traces laissés une fois déménagé ou de chambre. Une maison (habitation en dur) est appelée 7awş pl. a7wāş حوش ج احواش, ce mot désigne à l'origine l’entrepôt ou dormaient les bêtes, dans le tell il a prit plutôt le sens de ferme.


GENERALITES

La tente arabe traditionnelle en poils de chameaux et de chèvres ne doit pas être confondue avec la tente de toile de coton (bien que celle ci tend à s'imposer les nomades actuels) qui elles sont appelés gayṭūn pl. gwāṭīn ou gyāṭīn.
La tente des berbères nomades comme les touaregs est quand à elle constitué avec des peaux sechées.

Tente touareg
Gaytoun




(à suivre)


Pourquoi ce blog

Passionné depuis plusieurs années par l'arabe tel qu'il est parlé actuellement en Algérie (pays dont je suis originaire), j'utiliserai ce blog comme bloc-note pour mes recherches, afin de donner plus de consistance aux différentes observations que j'ai pu faire et qui s'entassent sur différents fichiers.

Les principaux sujets que j'essayerai de traiter ici:

- Les différences linguistiques existant dans le paysage arabophone d'Algérie en les mettant en relation avec les autres dialectes du monde arabe (les pays du Maghreb en premier lieu) et/ou l'arabe littéraire.

- Description de vocabulaire tournant autour de la vie rural principalement (la tente, les chevaux, etc...) vocabulaire qui se transmet que très peu aux nouvelles générations.

- L’étymologie plus ou moins obscure de certaines expressions couramment employés.

Mes sources sont pour la période ancienne: les études de dialectologie publiés durant la période coloniale et certains ouvrages écrit par les militaires qui ont participé à la conquête.
Pour les données actuelles je me sert de mes propres observations que j'ai put faire à travers mes fréquentation et mon entourage d'une part, et les différents matériaux disponibles sur Youtube.

Etant essentiellement autodidacte toutes éventuel précisions/rectifications sont les bienvenus.